no need to run (rouge)

One cannot answer for his courage when he has never been in danger.

no need to run | featuring @rouge
11.08.20 - day 1012

Depuis des semaines, voire presque des mois, Rouge ne te lâche pas. Elle veut absolument avoir sa mission pour aller trouver une porte. Sa mission n'est même pas de chercher, mais de trouver. Le pire c'est qu'elle l'aura sa satanée quête en duo. Aujourd'hui même. Allez rouquine, prépare-toi. C'est ton jour de chance. C'est exactement le genre de caprices qui lui prouvent que faire chier le monde, n'est pas un effort vain. C'est mal, mais qu'est-ce qu'on peut y faire, en vrai. Le temps est compté ici, alors autant vivre au jour le jour. Dangereusement. Peut-être. Sûrement. Mais, ça vaut la peine. De  ne pas se soucier du lendemain. C'est même important dans un contexte pareil. Tu ne sais pas comment tu aurais tenu le coup si tu n'avais pas cet état d'esprit. C'est le cas de certains. Ils se laissent noyer dans le désespoir à petit. Toi, tu essayes de sauver le plus de gens possibles. Mais, ce qui te tue, c'est l'incompréhension, l'inconnu. C'est ne pas savoir. Ne pas connaître l'origine de tout ça. La raison, s'il y en a une. Tout a un sens dans la vie. Tout arrive pour une raison. Cette île n'est sûrement pas une exception à la règle. Alors, tu te contentes de vivre. Un jour après l'autre. Sans forcément passer une éternité à réfléchir aux conséquences de tes actes. Tu acceptes les défis que la vie te propose. Sans flancher. Tu n'as pas le choix de toute façon. C'est le seul moyen de supporter tout ça un peu plus facilement. Ce qui doit arriver, arrivera. Alors, il ne faut pas avoir peur. Il faut tout affronter. Avec foi.

Tu étais obligée de lui faire subir un réveil matinal. Tu sais qu'elle n'en ait pas fan. Puis c'est une petite vengeance pour toutes les fois où elle t'a harcelé avec cette mission. Je t'attends à la sortie de la cité dans huit minutes. Dis-tu à mesure que tu lui jettes ses vêtements sur la tête. Elle te rejoint les yeux encore endurcis par le sommeil et l'esprit ailleurs. Tu souris en la voyant s'approcher. Tu lui fais signe de se munir de son couteau, qui risque de bien lui servir. Certains penseraient peut-être que c'est un geste imprudent. Qu'elle n'a que seize ans. Mais dans votre monde, les choses sont ainsi. Essaie de ne pas te tuer. Dis-tu en rigolant et en te dirigeant vers la sortie de la cité. C'est direction le champ fleuri que tu te diriges avec cette peste aux cheveux roux. Que Dieu te donne la force de la supporter toute une journée, en forêt.

lancer de dés:

T'as un super pouvoir. Oh ça ouais. Celui d'être bien casse couille, parce que depuis bientôt deux mois t'arrêtes pas de faire chier Moana pour qu'elle te mène en mission avec elle. C'est bien sympa les excursions pour récupérer de la bouffe et des ressources, mais t'en as vite marre. Tu vois beaucoup de gens partir à la recherche des portes, et toi t'as beau demander on te répond toujours que t'es trop jeune pour une mission aussi dangereuse, car là c'est pas juste rester aux abords de la Cité. Non, là c'est vraiment explorer, et c'est ce que tu veux. Et t'en as vraiment marre qu'on te prenne pour une gamine. Qu'on te rabaisse sur tes capacités. T'es forte et tu sais te débrouiller, en preuve t'as déjà pas mal de cicatrices, dont la plus récente celle de ton bras où une bête a faillit te gober toute entière parce que t'étais sortie sans le dire à personne. Celle que tu fais vraiment chier depuis un temps, c'est Moana. Faut dire que vous formez un duo, c'est  ta protectrice même si t'aimes pas ça. Ouais, Moana tu l'aimes pas, que tu dis. Toujours à être en confrontation avec elle, à chercher la petite bête. La vérité, c'est que tu t'accroches quand même bien à elle. Elle est forte et puissante Moana, et t'as beau pas le montrer, tu la respectes beaucoup et tu l'admires. T'es jamais douce avec elle, c'est rare les mots gentils, rare quand tu fais pas ta tête de cochon, et pourtant Moana, même si elle le sait pas forcément, elle fait partie des rares en qui tu as absolument confiance et que tu pourrais presque considérer comme un membre de ta famille.

Y'a sa voix qui te tire du sommeil et tu fronces les sourcils, tirant sur le drap pour te cacher la tête en râlant. « Gnnnn... » Tu lâches un grognement avant de comprendre ses mots. Et alors t'ouvres les yeux sous ton drap, te redresse rapidement en te prenant un t-shirt dans la gueule. « Me préparer ? On part en mission ?! » Mais elle est déjà sortie Moana, te disant que t'as huit minutes. Il t'en faut pas plus de trois pour être prête. T'as pas fait ton lit, t'as tout laissé en bordel derrière toi parce que bon, si tu pars vraiment en mission, tu vas pas perdre de temps à te faire chier à ranger derrière toi. Tu cours vers elle, le couteau de Wolf bien rangé sur toi. T'as les yeux qui piquent encore et t'arrives pas à retenir un bâillement. Mais tu la suis, t'as trop hâte de partir explorer. « Me faire tuer ? T'inquiètes ça devrait aller. » Tu lâches l'un de tes rares sourire à Moana. « Qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis ? Toi qui voulais jamais que j'viennes avec toi pour ce genre de missions »

One cannot answer for his courage when he has never been in danger.

no need to run | featuring @rouge
11.08.20 - day 1012

C'est donc toute une journée en forêt avec cette rouquine que tu dois subir. Il faut l'avouer, tu as des papillons d'excitation dans le ventre. Les jours de mission te donnent toujours cette sensation. Puis, ça a tout de même ses avantages d'être leader à la tête des protecteurs. Tu as des privilèges que d'autres n'ont pas forcément. Mais surtout, tu endosses un rôle qui te donne confiance en toi et te permet ainsi de faire de grandes choses. De oser. Car, dans la vie c'est comme ça. Il faut parfois avoir du culot et agir. Agir en conséquence. Oser aller contre les règles, quand quelque chose semble te répéter sans cesse qu'elles ne sont pas justes.

Tu t'égares dans tes pensées en attendant Rouge. Tu te réjouis déjà de la voir débarquer devant toi, les yeux encore à moitié endormis, mais l'étincelle d'excitation tout de même présente. C'est impatiemment que tu l'attends à la sortie de la cité. Elle arrive rapidement, parce qu'elle sait très bien au fond. Il ne faut pas être en retard avec toi. C'est jamais une bonne idée. Sa question interrompt le cours de tes pensées. Qu'est-ce qui t'a fait changer d'avis ? Toi qui voulais jamais que j'viennes avec toi pour ce genre de missions Elle n'avait pas tord. En réalité, l'idée de faire une mission avec la rouquine te tentait bien, quand tu y as pensé, hier soir. Alors, tu as suivi ton instinct. Tu t'es dis que c'était le moment. Maintenant ou jamais. Puis, disons que son harcèlement quotidien à ce sujet t'a bien motivée. Mais bon. Ça, tu ne l'avoueras jamais. Je ne me suis pas posée la question. Sûrement parce que je veux te pousser dans une porte. Peut-être arrêteras de me faire perdre la tête. Bien sûr. Tu fais allusions à ses fuites, qui deviennent maintenant une habitude, presque. Tu t'inquiètes, et tu ne peux pas le montrer, mais tu dois quand même la chercher. Ça te rend dingue. Parce qu'un jour maudit Dieu a décidé d'en faire ta protégée. Tu l'aimes au fond. De tout ton cœur. Mais, il ne faut pas dire. Il faut le susurrer, seulement.

J'espère que t'es prête. Et. Que tu vas pas regretter. Lui faire chier, c'est quand même aussi ta passion. Disons que vous la partagez celle-là. Tu sais pertinemment qu'elle le montrera jamais, mais au fond elle se posera quelques questions. Bien au fond, elle flippera même peut-être un peu. Forcément, tu sais pas à quoi t'attendre. Tu te lances dans l'inconnu. Et l'inconnu fait peur, tu le sais. Mais pour toi, ce n'est plus vraiment l'inconnu. C'est même devenu trop connu à force. Malgré ça, cette île ne cesse jamais de te surprendre. Il y a toujours quelque chose de nouveau, quelque chose de différent. Rouge. Ecoute-moi. Avant toute chose, il faut vraiment que tu restes près de moi. Tout. Le. Temps. Crois-moi. J'ai aussi connu mieux que ton odeur matinale d'adolescente, mais il faut faire avec. Tout ça, c'est pas la Cité. C'est le paradis là-bas, comparé à tout ce qu'il peut y avoir dehors. Vous partez en direction du Champ Fleuri. Tu ne veux pas lui faire peur, loin de là. Mais tu la connais si bien, cette étendue florale, que tu te sens obligée de la mettre en garde. Justement, lorsque l'inconnu devient un peu plus connu, alors, on a dressé notre environnement. On a moins peur. Son allure est si belle et envoûtante, que tu te fais avoir. Il ne faut surtout pas se laisser berner. Tu empreintes un chemin moins éprouvant à parcourir. Certes, une dizaine de minutes plus long, mais si tu peux éviter d'entendre la rouquine crier de fatigue, ça t'arrange. Tu as la chance d'avoir le choix, de pouvoir prêter attention à ses critères et répondre à tes attentes. Tu connais la forêt par cœur. Ou presque. Car elle ne révèle jamais tous ses mystères. Elle nous laisse y goûter que petit à petit.

Bien sûr qu'elle est au courant, Moana, de tes nombreuses fugues. T'aimes pas te le dire, mais c'est un peu comme ta mère ici. Celle que t'as plus dans la vraie vie, depuis que t'es petite. Celle que t'aurais voulu pourtant, et qui maintenant est devant toi. C'est normal que tu la fasses chier, que tu trouves toujours un moyen de la faire crier. C'est ce que font les enfants avec leur famille, leur maman. Mais Moana, y'a pas le sang. Y'a même pas de mot. Vous parlez pas de ça, jamais. De ce lien étrange qui t'unis à elle, du moins que t'espères avoir. T'as pas envie qu'elle s'occupe comme ça d'autre personne. T'as envie d'être la seule à avoir le droit à ses regards sévères qui montrent qu'elle tient à toi. Parce que c'est ta protectrice, à personne d'autre. T'as pas envie de la partager, Moana. Pas envie du tout. T'as déjà partagé ta vraie mère. T'es pas prête à recommencer. Pourtant tu sais pas vraiment si c'est réciproque. Tu te fais sans doute des films. Y'a Luz, qui te reprochait de pas user de ton imagination, mais au final t'es experte dans ce domaine, à t'approprier Moana comme ta mère. La nouvelle. Celle qui, tu l'espères, tu laisseras pas tomber. « C'est ça ouais, tu serais trop triste si je disparaissais ! » Tu supplies, tu pries. T'as envie que tes paroles soient vraies. Alors tu lui lances un regard qui se veut amusé, tu taquines, tu joues, mais dans le fond t'espères que c'est réel. « Bien sûr que j'suis prête. J'attends ça depuis des semaines ! »

Elle te met en garde, te demande de rester avec elle. Auprès d'elle. Tu fronces les sourcils parce qu'une nouvelle fois, on te prend pour une gamine qui n'est pas capable de se débrouiller seule. Mais le truc Rouge, c'est que c'est totalement vraie. Tu sais pas gérer le monde toute seule, même si tu dis le contraire. Même si t'aimerais prouver à tout ceux de la Cité que t'es une battante, que t'es assez débrouillarde pour te débrouiller. T'en as connu des bêtes sauvages, celles de Détroit, les hommes qui te regardaient, toi et tes copines. Qu'en ont recruté quelques-unes à qui tu ne parles plus parce qu'elles s'occupent en dansant dans des boites, en écartant les cuisses et prenant les billets. C'est jeune, et pourtant de là où tu viens, c'est la réalité. Y'a pas d'âge pour ça. T'as aussi connu les monstres aux couteaux, ceux qui piquent l'argent des mamies avant de les planter. Alors pourquoi t'aurais peur d'une île comme NIL ? Les bêtes n'ont pas la même têtes, mais c'est les mêmes dangers. Pourtant, t'assumes pas, t'avoues pas, mais ici y'a beaucoup de trucs qui te dépassent. « Ok ok.. Je t'écouterais. » Pour une fois tu rentres pas dans la confrontation. T'es pas idiote non plus, quand tu fugues c'est toujours dans un endroit que tu connais. Mais là, t'es en terre inconnue, et tu fais pas vraiment la maligne. Y'a beau avoir l'excitation qui se mêle à l'adrénaline de découvrir ce nouveau monde, y'a aussi la peur fait les cents pas dans le creux de ton ventre.

Et boum badaboum,
Elle tombe. Éjectée d'une porte, sa tête tape contre un cailloux et colore les fleurs d'un rouge intense.

Tu bouges plus, comme si c'était toi qui avait reçu le coup. Percutée la roche. Y'a beaucoup trop de questions qui te passent dans la tête. T'as jamais vu de mort. De cadavre. Est-ce que ce sera la première ? Est-ce qu'elle respire ? Est-ce qu'elle est morte ? T'ouvres même pas la bouche, tu respires même plus. Tu te dis que ça aurait pu être toi, y'a trois mois. Tu peux pas t'empêcher de regarder les fleurs qu'elle écrase. Que le corps écrase. Elles deviennent rouge, de plus en plus rouge. Rouge, comme ton prénom.
Ça aurait pu être toi.
Rouge.

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no need to run | featuring @rouge
11.08.20 - day 1012

Tu te languis toujours des moments passés en compagnie de Rouge. Tu en profites pleinement lorsqu'ils arrivent. C'est ça ouais, tu serais trop triste si je disparaissais ! Dit-elle tout en te suivant à la trace. Ta bouche ne peut s'empêcher de sourire, car tu sais qu'elle a raison. D'ailleurs, tu évites d'y penser, à ce moment. Tu vis dans le moment présent, totalement. Parce que sinon tu n'y arriverais pas. Juste la possibilité d'en être séparée un jour te rongerait l'esprit d'une noirceur inconsolable. Pourtant, au fond, tu sais que ça arrivera un jour. Mais tu t'efforces à ne pas y penser. T'en détacher, même. L'accepter. Et surtout, faire confiance. Je ne pourrais pas vivre sans toi, c'est sûr. Mais vie serait si ennuyante. Dis-tu tout en rigolant sarcastiquement. Au fond, tu n'étais pas si sarcastique que ça, mais tu ne le dirais jamais. Ou presque jamais. Dans chaque blague, il y a une part de vérité de toute façon. Toi, ce que tu fais maintenant, c'est que tu profites du moment présent. Tout peut s'arrêter. Dans dix minutes. Dans une seconde. Maintenant. Donc il faut vivre chaque seconde comme si c'était la dernière. Bien sûr que j'suis prête. J'attends ça depuis des semaines ! Tu parles, ça doit bien faire beaucoup plus que ça tellement ça paraît une éternité. Alors, tu voulais lui rendre un peu la pareille avec cette mission. La faire un peu baver. Des semaines! T'es gentille. Je dirais plutôt des mois... Ajoutes-tu toujours d'un ton taquin et sarcastique, alors que vous continuez d'avancer en direction de l'étendue florale. Rouge écoute attentivement tes instructions et semble peu à peu comprendre la réalité dans laquelle on vit. Tu sais qu'elle ira loin, Rouge. Tu es convaincue de son potentiel. Autant qu'une mère le serait pour sa fille. Tu as totalement confiance en sa destinée. Tu sais qu'elle fera de grandes choses. En arrivant dans les champs fleuris, tu remarques rapidement l'ouverture d'une porte noire. Très rapidement, cette dernière largue une jeune femme à deux mètres du sol. Son corps heurte le sol d'une force considérable. Tu te précipites à ses côtés tout en faisant signe à la rouquine de te suivre. Vous vous accroupissez aux côtés de son corps désormais immobile. Le choc la plonge dans l'inconscient et une marée rouge, notamment au niveau de sa tête, vient colorier l'étendue végétale. Tu vérifies son pouls silencieusement. Tu peines à le trouver, car il est camouflé par ton propre rythme cardiaque, accéléré par les évènements. Tu inspires profondément, puis expires doucement. Elle est toujours en vie. Vite, il faut qu'on l'aide. On essaye de la réveiller. Si on n'y arrive pas, il faut qu'on se débrouille pour l'amener à la Cité, afin qu'elle soit soignée. Tu bouges délicatement sa tête afin d'évaluer la gravité de la semble, que tu n'arrives pas à prononcer. Ce sera quitte ou double. C'est souvent le cas avec ce genre de blessures. Elle s'est blessé à la tête, il ne faut pas qu'elle perde trop de sang, il faut que tu appuies sur sa blessure, sans non plus trop la compresser. D'accord ? Dis-tu d'un ton sérieux et confiant. Tu sais qu'elle est chamboulée, tu le sais. Mais, tu veux la mettre en confiance et non pas l'inverse. Tu sais qu'elle peut y arriver. Sans aucun doute.

Non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non non tu peux pas.

C'est au dessus de tes forces. T'es comme paralysée, t'es comme une statue. Tu sais pas pourquoi. Tu pensais pas que d'être confronté à une possible mort comme ça te mettrait dans ce genre d'état. Le fait est que t'as du mal à respirer, à penser. Tu vois bien pourtant Moana qui prend les choses en mains. Elle te demande de l'aider, de toucher la presque morte. Mais tu peux pas Rouge. T'as même pas les larmes aux yeux, parce que t'arrives pas à les détacher du sang. De tout ce sang qui découle et s'écoule de son crâne, s'écroule sur les fleurs. T'as envie de vomir. T'as envie de tomber. T'es figée.

Figée comme le cadavre que tu vois.